joie et effroi d'être au monde
Julien Green à 33 ans. Sa vie est marquée dès la puberté par ce déchirement diabolique entre le spirituel et le charnel. Crédits photo : Rue des Archives/ Rue des Archives/Tal
On ne lit plus guère Julien Green. On a tort. L'auteur, qui se proclamait écrivain et catholique, a été progressivement délaissé par les libraires et les lecteurs. chaussures sport pas cher Pas assez sulfureux, sans doute, pas de confession impudique coram populo, comme on disait autrefois; hors mode, has been. Et pourtant. Cette réédition des confessions de jeunesse, entamées alors qu'il approche la soixantaine, nous montre, sous une plume verte et alerte, un homme immergé dans l'introspection. Je n'étais pas l'adolescent fier et poliment dédaigneux qui mettait ses distances entre lui et le monde ( En fait, je ne savais qui j'étais et passais à côté de moi même tous les jours de ma vie sans me voir. sac homme Une vie (1900 1998) marquée dès la puberté par ce déchirement diabolique entre le spirituel et le charnel. ses yeux, le pur et l'impur. Entre esquisses de bonheur et rechutes mélancoliques, joie et effroi d'être au monde. Ce qu'il a appelé l'enchantement du chagrin. Passion pour les vangiles et les épîtres, transmise par sa mère, native de la sudiste Géorgie, et son envers: passion pour le sexe fort, sa maladive idolâtrie de la beauté masculine.
la différence de Proust, Green ne fut pas le symphoniste de son affectivité hypertrophiée, mais l'auteur et surtout le lecteur de ses sentiments et de ses inclinations singulières. En chambriste appliqué. Le récit commence dès la plus tendre enfance, dans l'appartement du XVIearrondissement qu'il partage avec ses parents et ses trois s La lecture collective de la Bible se fait en anglais, sous le drapeau confédéré. Eléonore et Mary chantent et pianotent Mozart. quinze ans, après la mort de sa mère, il abjure le protestantisme et se convertit au catholicisme: Je commençais à vivre. Il s'engage en 1917 comme ambulancier dans la Croix Rouge, puis rempile dans l'infanterie. Ce sont les premiers voyages: Venise, où le monde chantait la gloire du monde et le c n'y battait que de bonheur, Gênes, la Sarre, parmi la troupe; la Bible et Baudelaire dans sa besace. Parvenu à l'âge d'homme, il part pour trois ans à l'Université de Virginie. Il y multiplie les relations masculines: Mark, Ed, Nick Fraîchement déniaisé, il avoue: Ce fut par le péché que je retrouvai l'humanité.
De retour à Paris, Green se voue à l'écriture romanesque. Encouragé par Morhange et Jacques Maritain, il rédige Pamphlet contre les catholiques de France, puis son premier roman, en 1926: Mont Cinère. Parallèlement, ce diariste volubile, le meilleur de son siècle aux côtés de Calaferte, poursuit la rédaction de son journal, entamé en 1919 sous le titre On est si sérieux quand on a dix neuf ans, et engage la rédaction d'Adrienne Mesurat, le roman de la frustration. Entre temps, il aura croisé quelques gloires naissantes ou confirmées: Sylvia Beach, Mauriac, auquel il succédera à l'Académie, et surtout Gide (Il me fait penser à un Lucifer déguisé en touriste). C'est rue Vaneau que les deux littérateurs s'éteignirent, à un demi siècle de distance.
