Ginny Soskey

Le plus grand danger pour une p
J mon activit depuis bient t 14 ans. Je me prostitue en parfaite connaissance de cause, d mani re lucide, glaciale, implacable, pragmatique, et au bout du compte sans trop d tats d me et sans tre si malheureuse que a. Pour ma part, je n jamais trouver aucune cr dibilit un t moignage de prostitu e qui accepte de para tre [dans une mission de t l ] visage reconnaissable par sa client le, alors que celle ci se trouve oblig e de gagner son pain par le biais de ceux l . Nous ne sommes pas b tes au point d sinc rement nos tats d me, nos ranc vis vis de tous ces hommes qui nous payent, alors que ces derniers vont nous reconna tre et, de d pit, en entendant la v rit sur eux, ne nous ferons plus b n ficier de leur manne financi re.
Aucune d nous ne va prendre le risque de saborder son outil de travail pour un reportage t l . Par contre, la complaisance, l loge du client et l de la prostitution nous permettront de pouvoir faire notre publicit ainsi que notre autopromotion. Il sera bien plus dans l r t de la prostitu e film e de caresser sa future client le dans le sens du poil que de lui balancer ses quatre v rit s.
C s r que si on commence dire aux clients : coute mon petit coco, je fais la p parce que je pr f re m avec toi pendant une heure que de me taper une semaine de m nages, je fais la p parce que physiquement je n pas t b nie des dieux, intellectuellement je n pas invent l chaude, je suis un peu la caricature de la pauvre fille qui sort tout droit de son caniveau. Quand on a un physique moyen, une intelligence moyenne, aucun talent, aucun savoir faire, aucun dipl me, aucune relation et que l veut sortir de sa mis re sans sombrer dans la d linquance la plus vile, la prostitution, c quand m me la chose la plus abordable si on a un physique au minimum solvable Si, tout coup, je m balancer cette v rit aux clients, c tout de suite beaucoup moins vendeur, moins glamour et racoleur. Notre travail consiste avant tout faire r ver le client. Ayant rencontr de nombreuses prostitu es, j pu constater maintes et maintes reprises que beaucoup d elles taient atteintes du syndrome de Stockholm. Elles ont une certaine forme de reconnaissance, elles estiment avoir un devoir de gratitude envers leur client le qui leur permet d chapper un travail harassant et mal pay . Il y a galement le lavage de cerveau qui est quelque chose de primordial si l d sire durer dans le m tier.
mes d buts, je me suis souvent menti moi m me, je me suis racont des histoires, je me suis fait croire que faire la p, a n tait pas si terrible, ni si horrible que a. Avoir recours ce processus psychologique tait pour moi une chose vitale, voire une question de survie. La prostitution de fa on professionnelle, comme unique source de revenus, est une chose tr s p nible aussi bien nerveusement, psychologiquement que physiquement. Instinctivement, j tout de suite compris qu fallait tout prix que je me pr serve. Et pour me pr server, la lucidit face ma prostitution serait quelque chose de tout fait inenvisageable. Si je commen ais me dire que mon unique fonction, que mon unique objectif professionnel consistait tre un d vidoir foutre. Que mon outil de travail serait des sexes d mal nettoy s. Que j passer mes apr s midi me frotter et me nettoyer le cul comme une malade mentale avec un savon gyn cologique antiseptique. Eh bien non, cette v rit ne pouvait en aucun cas me permettre de la regarder en face. Si, un jour, j l de regarder cette r alit et cette tristesse de ma vie, je sombre dans l ou la d pression. Alors, pour me mettre du baume au c et du c l je me dis que faire la p ce n pas si mal que a, que je gagne bien ma vie, que je rencontre des clients int ressants (MMMMOOOOUUUIIIII, BOF, BOF), que je fais les horaires que je veux, je pars en vacances quand je veux, enfin bref, je me balance tous les lieux communs et les imb cillit s qu entend habituellement quand on parle de prostitution. C un peu la m thode Couet : Tout va bien tout va bien tout va bien probl me avec ce m me tout va bien c que quand on commence gratter la fine couche de vernis, eh bien, ce tout va bien est plut t bancal, vacillant et claudicant. sac cuir femme bandoulière Il est une chose que j galement remarqu e, c que ce sont g n ralement les prostitu es les plus b tes, celles qui sont les plus superficielles, avec un quotient intellectuel d hu tre et qui ne pensent qu s des sacs main ainsi que la derni re robe la mode, qui vivent le mieux leur prostitution. vente de chaussure en ligne Leur manque de recul sur elles m mes, leur non regard sur leur activit , leur non lucidit sur le genre d qu sont devenues va faire qu seront les mieux m me de traverser ce passage de leur vie sans prouver trop d tats d me ni de f lures. Leur l g ret att nuera leurs blessures. Et c d dans l r t du client d face lui une p stupide ; car comme a, elle ne risque pas de lever son regard sur ce client qui cr ve de solitude, qui a peur de la solitude, qui estime que la solitude est une forme de maladie honteuse, ce client qui n pas se suffire lui m me et qui a besoin de se sentir exister travers le regard de la p, qui a son regard riv sur les aiguilles de sa montre.
Le plus grand danger pour une p, c la lucidit . R fl chir pour une p peut tre une calamit . C donc pour cela que je ne me pose plus de questions, je ne me remets plus en question. J bien trop peur du reflet du miroir. Maintenant, j trouv une m thode imparable : je me prends la t te, je l dans un trou de sable comme pour les autruches et je me r p te inlassablement, quotidiennement : tout va bien, tout va bien, tout va bien.
Effectivement, depuis que j la t te dans le guidon, tout va beaucoup mieux dans le monde enchant et follement merveilleux de la prostitution o tous les clients sentent la savonnette, le jasmin et le muguet, o tous les clients sont respectueux, sans aucune maladresse ni brusquerie, me caressent avec douceur ; dans ce monde fabuleux o les clients sont des rudits avec des conversations hautement philosophiques et ne nous font pas ponger leurs in narrables d boires conjugaux, ainsi que la m diocrit et la petitesse de leur existence. Je suis terriblement panouie dans ce monde prostitutionnel o les femmes ne se prostituent pas pour de l mais par plaisir de se faire par l qui va m ses odeurs corporelles ainsi que ses s cr tions.
J pris une bonne r solution, il y a quelques ann es, auparavant je m ais co te que co te d d la passe avec le client. Un jour, je me suis dit qu ne fallait justement pas que j d mes actes. Je devais accepter. Accepter ce dernier gros porc ahanant sur moi. Je devais accepter ses coups de queue r p tition, accumul s, de la terre la lune, de la lune la terre. Je devais accepter ce dernier cunnilingus mal fait. Occulter ne ferait qu les choses et laisserait en moi des souvenirs et images imp rissables. Accepter, accepter encore et toujours accepter, surtout ne pas me sentir utilis e, essayer tant bien que mal de poser un regard d tach sur ce client qui m comme un jouet pour adultes.
Je devais accepter le regard m prisant que la soci t pose sur moi. Je devais apprendre ne plus occulter, je devais apprendre faire avec. J pass toute ma vie d d passer mes limites pour copuler avec des hommes qui me r pugnaient au plus haut point. J fait toutes ces choses pour l Toutes ces choses, je ne les aurais jamais faites par amour ou par amiti . Et oui, derri re ces visages bien maquill s, derri re ces corps bien emball s, bien appr t s, derri re ces sourires enj leurs et commerciaux, que d cach es, que de questions sans r ponse, que de doutes, que de gouffres, que de peur face l que de terreur face sa vie et la vie ?

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